Adjacent

Une ère de repos
Clément Arnaud, Marion Artense-Gély, Victor Levai, Mathilde Vallantin Dulac
24.04 — 19.05.24

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L’exposition ne serait pas très éloignée de l’atelier ou de la maison. Si l’on tendait l’oreille, on entendrait aussi bien le bruit de la machine à café, des fragments d’une discussion que peut-être le vent dans les feuilles ou les oiseaux qui annoncent le printemps. La bande son composée par Mathilde Vallantin Dulac dessine un entre lieu, un espace qui n’existe que par la superposition et le montage. Un espace harmonieux où se confond le temps de la création, du faire et celui de la vie.
Victor Levai et Clément Arnaud collaborent régulièrement ensemble, expérimentant de concert avec leurs médiums de prédilection, la céramique et le bois, tout en jouant des limites de la fonctionnalité. L’espace domestique qu’ils parviennent à recréer ensemble, l’un par un miroir, l’autre par un banc a quelque chose d’accueillant. Ils ont en commun de penser la place pour l’autre, de l’inviter à prendre du temps, à s’asseoir, à regarder et peut-être à se voir au travers de leurs créations.
Les assises de Clément Arnaud, socles ou étagères, composent avec le bois, ses limites et sa forme, de façon presque ludique. Ce jeu de construction et d’équilibre, qui peut rappeler formellement Rietveld ou Breuer, a ici quelque chose de plus organique de par l’échelle de production, très artisanale. Chaque objet est unique même si parfois l’un semble le prolongement de l’autre.


Dans son recueil de nouvelles Nouvelles de nulle part, qu’il sous-titre “Une ère de repos”, l’artiste-artisan, l’auteur et fabricant William Morris imagine une utopie socialiste où s’est imposé une société plus en rapport avec la nature où la relation au travail et l’organisation de la vie est plus juste, plus apaisée. Ce sous-titre pourrait ainsi ouvrir cette exposition qui semble ouvrir une nouvelle temporalité, plus contemplative, plus attentive. Pour cet acteur du mouvement art & craft, il s’agissait au XIXème siècle de réagir par des formes tout autant qu’un mode de vie à l’industrialisation, à la production de masse et à l’extractivisme qui en découlait. Alors que ses textes sont retraduits et aujourd’hui publiés en France, les artistes qui reprennent son vocabulaire floral et s’inscrivent dans sa vision des arts décoratifs imaginent une façon d’habiter qui soit plus consciente des rythmes du vivant.
Victor Levai, sans pour autant chercher le mimétisme, s’inspire des structures presque géométriques des plantes, et par ses œuvres de métal et de céramique propose de suspendre le temps de la floraison ou la marcescence. Moments particulièrement fragiles et éphémères qui deviennent l’expression d’une tension faible.
Marion Artense-Gély, au travers de ses peintures, propose elle, de se confronter au vertige du ciel qu’elle figure comme des abysses. Elle déplace notre regard depuis la terre, depuis la surface vers la profondeur, en travaillant par couches d’huiles successives et glacis. Cherchant l’immersion et appelant à la contemplation, elle revendique l’importance des gestes et d’un processus lent. Figurant notamment des ciels de nuits, avec la toile She sings in the Dark, elle propose de prêter attention aux lumières que l’on finit par ne plus percevoir dans les villes, celles des lucioles, des étoiles ou de la lune quand vient le moment du repos.


Henri Guette